Muze : un mook culturo-littéraire
Depuis quelques années ont surgi en librairie des revues hybrides, souvent à parution trimestrielle voire bi-annuelle, et à qui toute la presse s’est accordée à donner le nom de « mooks » (contraction de book et magazine). Car ce sont bien des objets à la frontière entre le magazine et le livre, voire le beau-livre pour certains. Qualité du papier, des images, des textes et articles, approfondissement des recherches, sujets plus ou moins pointus, et public restreint caractérisent ces revues.
De la politique au social, en passant par le sport, l’art ou les sciences, il y en a pour tous les goûts. Prenons l’exemple d’un mook littéraire (à tendance culturelle plus générale) : Muze.
À l’origine (2005), Muze était un magazine mensuel dont la cible était un peu difficile à cerner : la revue s’adressait à des jeunes femmes de 15 à 30 ans, ce qui est assez vaste. Son contenu tournait principalement autour de la littérature, et comportait, en plus d’entretiens avec des auteurs (femmes), des portraits d’artistes et des critiques, un cahier annexe de textes inédits (souvent des nouvelles) d’auteurs reconnus.
Or, très vite, Bayard et la rédaction de Muze se sont rendu compte que la formule ne fonctionnait pas : trop peu d’abonnements, une cible de lectrices trop vaste pour trouver un véritable ancrage dans la pléthore de magazines pour la jeunesse. Peut-être que la catégorie « jeunes adultes » n’était pas encore suffisamment une réalité socio-culturelle pour être pertinente.
Quoi qu’il en soit, après avoir temporairement disparu, Muze a reparu en 2010 sous la forme qu’on lui connaît aujourd’hui, et dont le public, moins large, est sans doute plus « sûr ». D’où la forme du « mook », et une parution trimestrielle.
Quelle est donc cette nouvelle revue, et quel est son intérêt principal ?
Si le fond et la ligne éditoriale sont globalement restés les mêmes, un gros effort qualitatif a été apporté (Stéphanie Janicot, romancière, en est la rédactrice en chef). Le papier a changé (plus épais, il offre un objet de plus haute facture), la charte graphique et la typographie ont été modernisées, là encore pour rehausser qualitativement la revue dans le paysage des périodiques contemporains. Par ailleurs, l’idée est, plus que jamais, d’offrir au lecteur curieux un bel objet : un titre de couverture en gaufrage, des images de qualité présentées parfois sous la forme de cahiers-photos, des titres d’articles intrigants et une mise en page alléchante y contribuent.
Pour ne pas se fermer de portes en terme de lectorat, Muze a également élargi son contenu, et laissé à la marge la seule “littérature”, comme en témoigne sa devise (par ailleurs un peu terne) : « Littérature, musique, arts plastiques, cinéma, photographie… La culture est un plaisir qui se construit et se transmet. » Ils auraient pu ajouter à la liste des thématiques : art corporel, danse, sport, géographie, sociologie, psychologie, mode… Car l’idée est donc avant tout de traiter en profondeur certains sujets méconnus, en lien avec l’actualité culturelle (expositions, sorties ciné…).
Au sommaire du dernier numéro ? Photographie et Comédie-Française, une rencontre avec Muriel Mayette, directrice de cette institution théâtrale ; les créatrices britanniques ; les femmes et l’argent ; vivre en philosophie ; atelier d’écriture…
Ce que la revue ne met pas spécifiquement en avant, et qui est pourtant au chœur de son message, c’est la femme. Sans être autant vindicative qu’une revue explicitement féministe comme Causette, Muze est, et restera sans doute, une revue dont les lecteurs sont principalement des lectrices. Ce que les rédacteurs(trices ?) se gardent bien de dire dans la version papier (contrairement au blog), de peur de perdre d’éventuels lecteurs masculins ?
À vous de vous faire une idée ! Le dernier numéro de rentrée est en librairie depuis le 12 septembre (pour la liste des points de vente, c’est ici). Pour plus d’infos, rendez-vous sur le blog de la revue.
Et pour un panorama plus large et un point de vue plus désabusé sur les mooks, vous pouvez lire cet article de Télérama.
Lorraine
Retrouvez Muze sur Facebook ici !
C’est amusant, mais je n’ai pas vraiment le même point de vue sur cette revue.
Pour moi, la base line est « se cultiver autrement » et il n’a jamais été fait mystère que la cible est féminine, qu’il s’agit de questionner la création au féminin. j’ai eu l’occasion de lire des interviews de la responsable de la revue, elle le disait à chaque fois. Il y a des lecteurs masculins, qui s’intéressent à la création au féminin. Je me souviens d’un édito adressé aux lecteurs masculins et même d’un dossier entier sur la condition masculine.
Je ne vois pas non plus en quoi le blog est différent, au niveau des lectrices et lecteurs. J’ai jamais lu sur le blog plus d’attention aux hommes ou aux femmes. Mais j’ai peut-être raté des choses.
Enfin bon… Pour moi c’est une très bonne revue parce qu’elle va en profondeur dans les sujets traités. Et ça c’est rare, à l’heure de l’info instantanée.
Bonjour, merci pour votre remarque. Effectivement, le lectorat est mixte, et rien que le titre de la revue indique que les sujets traitent de la « création au féminin ». En revanche, il me semblait avoir vu une évolution dans la communication autour de la revue entre l’ancienne version et la nouvelle. Mais peut-être que je me trompe. Je n’ai pas eu accès à ces interviews de la responsable mais cela m’intéresse : peut-on les trouver sur internet ? Je suis également tout à fait d’accord pour dire que c’est une revue de qualité, qui traite les sujets en profondeur et les met en perspective. Rare et précieux, en effet.
Lorraine
Bonjour,
J’ai cherché l’édito où la rédactrice en chef s’adressait aux hommes, mais je ne l’ai pas retrouvé en ligne. Désolée.
Je suis un lecteur de cette revue, et ce depuis sa période magasine… et pourtant, je suis bien un garçon ! Depuis son passage au Mook je suis ravi ! De très belle facture, vraiment riche, je la lis avec autant de plaisir que je lis le mook Rockyrama ! 🙂